Marcel Moreau, tambourinaire des abysses

Pour Marcel

L’écrivain Marcel Moreau fait des pulsions, des forces telluriques qui habitent  nos profondeurs, des « instincts éclairés». Cette métamorphose des fonds de corps s’opère par la puissance du langage chargée de doter d’un sens lumineux et créateur les sens obscurs de l’homme.  Incessantes solifluxions du corps verbal dans le corps charnel, du corps charnel dans le corps verbal. Tout ce qui loge dans la profondeur des corps se voit fécondé par la « puissance du langage », la « femme des abysses ». Le rythme d’une écriture ainsi alliée au corps, insuffle de tels mouvements à la pensée, qu’il propulse vers le haut, dans un jaillissement d’art, les gisements indansés de l’âme. Par la force des roulements du verbe, par son rythme généreux en sécrétions incandescentes, les coulées de corps ne dégénèrent pas en épaves sordides, mais écrivent au fil d’un amour-océan les lignes d’un continent-livre que fouettent de vivacité les respirations mêlées du sens et du non-sens, de l’esprit et de la matière. Les mots habités, creusés, caressés, fécondés, réanimés par la fougue du corps verbal, ouvrent l’être à des paysages de steppe dont les libres chevauchées mettent en échec les rétrécissements auxquels nous conditionne la pensée dominante dont le langage stéréotypé nous initie toujours plus à la chorégraphie du robot. Le corps se dote alors d’une autre santé car l’auscultation par la langue-torche sait faire jaillir des cavités interdites un dire de l’antre désormais guérisseur des destructions irrémédiables qui s’effectuent dans l’organisme. Les mots-râles, les mots à Continue reading