A propos de “Au commencement était la mort …” de Sylvia Debecker.
Par Guillaume Sens Deterre.
L’étincelle, le journal de bord d’Anomal Tribu, janvier 2014.
Quelque chose entrave la liberté de S. qui la conduit à revenir sur ses années d’enfance. S., la narratrice, cherche des réponses. Elle se débat avec une amnésie partielle. N., la sœur égocentrique autour de qui tout le monde tourne. G., le petit ami de N., possessif et jaloux. C., le professeur de piano, les parents, la famille, les amis…
Au départ, les frontières semblent claires. Je suis moi et les autres sont les autres et puis, petit à petit, tout se mélange, quelque chose de l’autre passe en soi et ce qui est clair devient obscur. Quelque chose se dérègle que S. cherche à contre effectuer. Un glissement, comme une contamination qui, loin de procéder par dialectique du maître et de l’esclave, se répand viralement dans l’imaginaire de l’enfant S. Dès lors elle doit se défendre également de ces personnages conceptuels qui l’assaillent de l’intérieur, qui s’affrontent au travers de bribes de passé. Son nom même sonne comme une question : est-ce ? (S.) alors que les initiales des autres protagonistes personnifient des concepts qui entretiennent ensemble des relations étroites puis affectent les uns et les autres.
C’est une véritable enquête psychologique que nous livre Sylvia Debecker, l’histoire d’une dépossession qui nous laisse voir la double ellipse de ce qui se déroule à la fois à l’extérieur et ce qui fait écho à l’intérieur de soi. Un livre en deux mouvements : la langue de l’enfance au travers des histoires de la vie commune de N. et S. et le mouvement de la conscience qui porte devant la mort les savoirs du corps. Un livre biographique, dense, authentique, où chaque histoire, chaque événement nous conduisent inéluctablement vers un dénouement à rebours. .